lundi 19 janvier 2009

Extrait de : Lettre aux thérapeutes

Tout est pur à la Source, nulle part ailleurs disait Maître Eckart ; avec Jean Yves Leloup nous nous rapprochons de la Source : faisons silence et écoutons sa musique.

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Le clair silence du corps qu'on appelle la tranquilité peut aider parfois à entrer dans ce clair silence du coeur qu'on appelle la compassion. Le coeur qui aussi a ses agitations, ses bruits, ses rumeurs, ses rancoeurs, ses jugements, ses peurs surtout ; tout ce qui fait noeud et obstacle à la simple circulation de la Vie qui à ce niveau d'être s'appelle la générosité, la confiance, le respect et encore l'amour.

Par les temps qui courent on peut s'étonner qu'il existe encore dans l'homme de la bonté, autrefois on appelait la Bonté, avec la Beauté et la Vérité, un "Transcendental" ; il n'y a rien pourtant de plus immanent, de plus intime ; mais cette bonté est sans doute "la preuve" ou "l'épreuve" de ce qui en nous, nous dépasse.
Tu l'as sans doute remarqué la bonté est cette qualité qui émane d'un coeur silencieux qui a cessé de juger, de condamner, d'exiger, de commander, qui a cessé surtout de se plaindre et d'accuser. La compassion c'est notre véritable nature qui se révèle au coeur, quand celui-ci n'est plus dans l'attente ou dans la peur.
"Quand je suis heureux, puisse mon mérite se répandre sur autrui, puisse sa bénédiction emplir le ciel, quand je suis malheureux, puissent toutes les souffrances de tous les êtres être miennes ! Puisse l'océan de souffrances se dessécher" disait le 1er Jamgön Kongtrui.

Le clair silence du coeur, est-il proportionnel à son ouverture, à sa non clôture, au "non enfermement sur soi" ? Il est néammoins difficile de dire à quelqu'un comme le faisait Dilgo Khyenstsé : "Toutes vos difficultés viennent de ce que vous ne prenez guère en considération l'intérêt d'autrui. Quoique vous fassiez, regardez constamment dans le miroir de votre esprit et vérifiez si vous agissez pour vous-même ou pour les autres".
C'est presque mot pour mot ce que disait Soeur Emmanuelle avant de mourir, ajoutant que "nous sommes malheureux par manque d'intérêt pour les autres"
La compassion c'est le signe d'un coeur en bonne santé et en harmonie avec tout ce qui l'entoure ; que ceci ou cela soit agréable ou désagréable tout est le bienvenu dans un coeur dont le seul souci est d'être "bon" ou d'être "don" comme le soleil qui donne sa clarté à l'or comme à l'ordure.

Etre bon c'est se souvenir que la source de la patience en nous n'est jamais loin, et que la source a soif d'être bue et de nous rendre capable de dons là où nous pensions ne jamais avoir assez d'eau.
"Nous ne devons pas oublier que dans l'être humain le plus perverti et le plus cruel, tant qu'il est un être humain, existe une petite graine d'amour et de compassion qui fera de lui, un jour, un bouddha" Dalaï Lama
J'ajouterais que dans l'être humain le plus malheureux, existe une petite graine de compassion, qui, s'il la donne, lui fera oublier son malheur. Le Thérapeute "veille au grain", il ne tire pas sur la graine, il lui rappelle sa capacité de croissance, sa bonté essentielle. Ce clair silence du coeur qu'on appelle compassion (sans laquelle on ne peut pas faire de musique ensemble), n'est-il pas dépendant du clair silence de l'esprit qu'on appelle l'Eveil.

Est-ce par le calme du corps ou par le calme de l'esprit qu'il faut commencer ? Je crois que cela dépend de chacun, en tout cas le calme de l'un ne va pas sans l'autre.
Lorsque le souffle est tranquille, le mental et l'affectivité se détendent. Lorsque le mental est calme et silencieux, l'affectivité et le corps s'en trouvent mieux - ce sont des évidence ! ............

Même s'il est clair que la source de la majorité de nos "maux" soit dans le mental, il n'est pas évident pour beaucoup que le clair silence de l'esprit, c'est à dire, un état de non pensées, de "non-saisie" par le mental d'objets internes ou externes, un état de contemplation, soit la source de notre salut et de notre éveil.
Qu'est-ce que la contemplation ? De nouveau il s'agit d'un état d'ouverture, de réceptivité à ce qui est, sans fixation particulière sur telle ou telle "chose", c'est voir toutes choses dans le jour (dies), dans la lumière. La Lumière ou "l'Espace" qui est le Temple (contempler c'est entrer et êre dans le templum - le Temple).

Considérer notre esprit comme un ciel sans nuages qui contient et accepte tout : présence et absence, être et non être, bonheur et malheur, bien et mal, tous ces concepts et ces oppositions sont abandonnés, on laisse reposer son esprit dans un état d'accueil simple, bon , sans souci : "ce qui est, est, ce qui n'est pas, n'est pas". Tout ce qu'on dit de plus c'est du mental, des projections, c'est du mensonge, du bruit sur le clair silence de "ce qui est ainsi"..... Et mes mots en cet instant, que sont-ils sur la page blanche ? Du bruit ?De la musique ? Qui sait ?
Tout n'est-il pas écho du clair silence ?
Alors accorde quelques compassions à mes bruits qui tentent de s'harmoniser aux tiens......
Tu peux les laisser avec les autres pensées, comme les remous sensés ou insensés d'une source....ils s'effaceront naturellement eux-mêmes.

Jean Yves Leloup

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